mardi 16 juillet 2013

Myriam Bat-Yosef, Piano peint (1974)



« Observer M. Bat-Yosef évoluer dans son atelier parisien parmi ses œuvres, me montrer telle toile, tel objet, le tout ponctué par de brèves et précises explications dévoilent la richesse et la beauté d’une vie exclusivement vouée à la création. Au cœur de cette aventure artistique, résonne l’écho feutré d’une musique intérieure rythmant une quête incessante, tendue vers la recherche d’une vérité essentielle qui donne sens à sa vie. Ce n’est pas tant de l’œil de chair mais de l’œil de nuit cherchant les fils d’or de la réalisation totale de l’homme dont il s’agit. Pour M. Bat-Yosef l’art de vivre consiste à trouver l’équilibre entre les forces contraires. Cet art de vivre qui rejoint le point sublime, lieu de résolution des antinomies, Myriam l’a personnifié en sa totalité. Une cohérence remarquable et sensible tisse la trame de son cheminement artistique.

Je me trouvais face à l’œuvre de toute une vie ; une œuvre demeurée trop longtemps dans l’ombre bien que saluée par Anaïs Nin, Nancy Huston, André Pieyre de Mandiargues, José Pierre, René de Solier, Jacques Lacarrière, Alain Bosquet, Alain Jouffroy, Pierre Restany, Sarane Alexandirian et André Breton qui, après une visite à son atelier, confiera avoir été intrigué par sa dimension fantasmagorique.

Si l’obscurité est une composante de la lumière, il arrive un temps où la clarté intérieure doit épouser les courbes du jour afin de donner à voir. Et c’est précisément ce que M. Bat-Yosef fait, elle donne à voir, un monde issu de l’athanor de ses perceptions. Un univers de symboles, de couleurs, de formes ouvre le regard sur de nouveaux paysages mentaux où fusionnent érotisme et fantastique.

Comme le souligne René de Sollier : « On devra s’interroger, il est temps, sur le rôle des femmes dans le surréalisme et la peinture, le fantastique contemporain, et songer à une histoire vraie, qui groupe : Valentine Hugo, Léonore Fini, Dorothea Tanning, Léonora Carrington, Unica Zürn, Jane Graverol, Toyen, Bona, Manina, M. Bat-Yosef. (…) On est impressionné par ce non-conformisme et les dissidences, une fierté inventive, menée à bien. Un musée inquiétant en résulte, plus riche que l’imagination ». C’est à ce dessein que ce livre existe, quand bien même M. Bat-Yosef. ne prit jamais part aux activités du groupe surréaliste ; elle épousa du surréalisme sa dynamique, son insoumission et son utopie sans pour autant adhérer à tous ses principes.

Et il y eut cette injonction, ces paroles Sésame aptes à ouvrir les cœurs à hauteur des orages, qu’elle prononça : « Je veux surpasser le dieu de la Bible qui a fait l’homme à son image et métamorphoser l’homme à l’image de mon art ! » Ainsi, dans la lignée « des voleurs de feu », la flamme prométhéenne venait de tracer une voie, unique, celle de la « révélation ».

(texte de Fabrice Pascaud)

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